On était en plein été, et c'était une de ces journées typiques de cette saison où, malgré les quelques nuages dans le ciel et le manque de lumière solaire, une chaleur pesante, étouffante, règnait sur la ville, et de minuscules petites bêtes noires se collaient sur chaque parcelle de peau nue que les badauds se pressant en masse dans le centre commercial pouvait laisser appercevoir. Un temps d'orage.
Et malgré cela, malgré le fait qu'elle était sur le point de faire une syncope tant elle était sensible à la chaleur, Lily sortit d'une boutique, arborant fièrement une magnifique veste en cuir qui semblait hurler à toute l'assistance présente : "je vaux un an de votre maigre salaire, pauvres mortels".
Il fallait dire que la famille de Lily avait largement les moyens de lui offrir, même en étant à l'autre bout du monde, un compte en banque plus que largement fourni dans lequel elle n'hésitait pas à piocher régulièrement, surtout lorsque son moral était au plus bas et qu'elle avait besoin de se faire un petit "cadeau de remontage de moral de moi à moi"... Comme ce jour-là, par exemple. Et cette fois-ci, elle avait craqué sur un article qui bien que absolument pas adapté à la saison était incontestablement magnifique. La veste était de cuir noir et mat, longue jusqu'en dessous des genoux. Voilà qui donnait une certaine classe à Lily qui était pourtant, comme d'habitude, habillée comme un sac : un débardeur rayé gris, trois fois trop grand pour elle et dont les bretelles ne cessaient de glisser sur ses épaules, et un bête jean bleu dont le bas des jambes était complètement déchiqueté à force d'avoir traîné par terre.
Donc, elle était en train de sortir de la boutique où elle venait d'acheter sa petite merveille... Tout du moins, elle essayait, car la foule était si compacte qu'elle avait bien du mal à s'extirper du tourniquet. Au moment où elle craignait de rester coincée dans cet engin et de se voir forcée de refaire un tour de manège voir plus, elle réussi finalement à se tirer de là. Elle fit un tour sur elle-même, regardant sa veste sous tous les angles afin de vérifier qu'elle n'avait aucun accros, puis, rassurée, se mit en route vers la sortie la plus proche. Pour ce faire, elle entreprit de longer la vitrine du magasin. Mais elle n'avait pas fait trois pas qu'elle fut percutée par un groupe de gamine d'à peine treize ans, sapées comme des, n'ayons pas peur de le dire, pétasses, qui allaient dans le sens contraire, et qui l'envoyèrent valser contre quelqu'un qui se tenait devant la vitrine. Les gamines ne prirent même pas la peine de s'excuser et taillèrent la route en ricanant.
Lily les laissa filer, affichant un air particulièrement blasé. Puis elle se tourna vers la personne qu'elle avait heurtée et ouvrit la bouche dans l'idée de lui présenter ses excuses, lorsqu'elle sentit quelque chose de poisseux sur ses doigts. Elle baissa aussitôt les yeux vers sa main et découvrit qu'elle était pleine de glace... Tout comme l'était sa veste flambante neuve. Lily poussa une sorte de petit couinement entre la surprise, l'effroi et le dépit. Puis elle releva les yeux vers le garçon qui se tenait en face de lui, et remarqua le cornet de glace dégoulinant qu'il tenait à la main.
Interdite, elle le fixa d'un regard bien étrange, à mi-chemin entre "je vais te faire la peau" et "mais qu'est-ce que... qu'est-ce que... ??!!".